Sunday, January 25, 2009

EnfantRoi

Je regardais la dame, qui me regardait en échange.

Bien-être absolu, être regardé. Que pensait-elle de moi ? Que savait-elle ? Que se passait-il dans sa tête ? Imaginait-elle que j'étais un serial killer, probablement pas, un pédophile, un voleur de voitures, un flic, un étudiant sérieux ?

Et puis la réalité me tapota l'épaule.

Je baissais le regarde vers l'assemblée, réunie pour je ne sais quelle raison. Je faisais partie de ces gens que je connaissais pas. Lui, par exemple, avec sa vieille tête de « je suis un jeune patron et un fier papa qui adore mes enfants et mon travail et ma voiture et ma femme et ma maîtresse et la vie et le pâté (etc.) », je ne le connaissais pas. Je ne connaissais pas non plus son pull gris à rayures vertes, je connaissais pas ses lunettes, je ne connaissais ni ses rides, ni son âge.

Et je m'en tapais complètement.

J'avançais dangereusement dans la foule. Elle me faisait penser à une flaque de sperme avec tous ses petits tétards de la génétique qui batifolent, heureux en apparence et jouent et rient et se ruent comme des crèves-la-dalle vers l'ovule en espérant en picorer un peu. Et moi je suis le canard boiteux, le spermatozoïde sans flagelle qui refuse même d'aller à contre-courant. Le sur-place est tellement mieux.

Il y avait des sortes de mouvements semblables à des vagues avinées. Les hommes riants allaient de l'avant, suivis par leurs femmes. Derrière, les enfants s'éparpillaient en petites ondes criantes qui éclaboussaient le monde avec leurs rires gorgés de morves à cause de l'hiver. Parfois ils se brisant sur une table et s'étendaient en un dessin grotesque que leurs parents encradreront au lieu de brûler.

Un soleil, un ovule hérissé, une maison, des humains-bâtons avec simili-sourires, une corde à sauter.

Je louvoyais maldroitement en faisant tomber quelques gosses et m'amarrais face aux dessins. Je jetais mes yeux par-dessus mes épaules, attendant que la marée soit descendante et puis je m'amusais sur les créations. Une mine anti-personnelle par là, une cadavre par ici, un chybre, un canard. Je signais de faux noms, me marrais, me roulais une clope, la fumais ici même.

On vint m'engueuler. Je sortais.

Dehors le monde était calme. Le monde était beau.

Un soleil rachitique pissait une lumière sanguine sur le sol boueux de la campagne. Les rues, de simples, très simples rues de province, avaient l'air peu vivant des vieilles pierres du monde romain. Un vieillard était adossé sur un muret mais tout dans son apparence, ses vêtements et sa peau, était de la même couleur que l'univers. Je dus me concentrer pour le voir dans la lumière impuissante du début de la soirée.

Un rayon encore très vif passa au travers de mon verre encore plein. J'étais persuadé de l'avoir laissé là-bas, dans la salle aussi anonyme que ses occupants. A travers la vinasse la lumière,pris une couleur de rose délavé.

Je vidais le verre avant de le jeter.

Où étais-je ?

Que pensais-je ?

Où allais-je ?

Qu'est-ce que ça pouvait bien faire ?

La nuit tombait en silence.

Deuxième à droite et tout droit jusqu'au matin.

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