Monday, February 2, 2009

Notice1

Après quelques jours/mois de méditations, j'approche enfin d'une perspective intéressante. Les idées qui tournaient en se jetant parfois les unes sur les autres ont fini par se solidariser et ces temps-ci j'entends beaucoup de « cloc! » quand elles arrivent à s'emboîter.
Dans l'ordre.

L'idée d'essayer d'établir une hiérarchie entre style, narration et idées (qui restent , bien extrêmement intéressantes, facultatives) est bien entendu fausse puisque n'importe quelle combinaison est possible pour arriver à un résultat satisfaisant.(rg.1)

Démonstration sur la nouvelle à titre d'exemple; "Mort d'un ami".

« Dehors il pleut. Le ciel est couleur gris très clair du genre jeune cadavre commençant à vieillir. Un peu de vent pour secouer les arbres nus de son crachat turbulent. En résumé, il pleut. Je ne sais pas quoi dire de plus.
Dedans aussi il y a une forme de pluie plus sociale et salée. Un ami est mort hier et on l'enterre demain. Deux jours de formalités alors aujourd'hui c'est chagrin. »


Comme vous pouvez le non-lire, c'est nul.
Je m'explique; le style est passable, c'est peut-être ce qu'il y a de moins mal. Dans une ferveur animalière il ne casse pas trois pattes à un canard. La narration est molle, archimolle, ce qui veut dire que c'est chiant. Ça n'en a peut-être pas l'air comme ça, la mise en page joue beaucoup plus qu'on ne veut bien le croire à la dynamique d'un texte. Mais en fait il ne se passe rien. Là, le style ne supporte pas la narration qui du coup s'enfuit. Vous pouvez me dire « oui mais c'est une description de paysage, pas d'action, etc. » d'accord, c'est vrai. Mais la littérature du XXI ème siècle est une littérature qui demande à bouger (ça y est je me la pète), et l'action doit être très présente.
Niveau des idées ; là sans spoiler je dois dire que le personnage raconte une journée (première partie : « Aujourd'hui » ) qu'il vit mal car il s'ennuie et, on s'en doute, a un problème avec les codes, une sorte de phobie des codes sociaux. Comme c'est un texte à la première personne, il faut que ça soit imprégnée de la mythologie personnelle du héros.

Deuxième essai (de ce même passage je ne recopie pas les trois essais de 2 pages) :

« La pluie dehors.
Ciel couleur monocorde au teint de bistre pâle, une sorte de reflet du sol. Ou l'inverse. Le vent sorti de nulle part s'encolère et fustige les arbres gris et chauves à la peau de lèpre. L'automne est sur nous.
Dedans des pleurs, je crois.
C'est une forme de pluie plus sociale et salée, une pluie humaine qui obstrue les pores et assèche la peau. »

Je suis déjà très content des années-lumières parcourues depuis le premier essai, distance non-négligeable que j'ai pu franchir grâce à cette « illumination » (grosses parenthèses puisque j'y pensais depuis longtemps mais qu'aujourd'hui l'idée s'est enfin concrétisée, si je puis dire) : l'écriture est un code qui, pour raconter quelque chose, ne nécessite pas un travail de ressenti, mais un véritable travail de programmation, quasi-scientifique de la part de l'écrivain qui est en charge de TOUT le travail (rg.2).

Pas de « je laisse vivre mes personnages » ou de « J'écris ce que je ressens de telle situation », ça ne marche pas sur des textes construits et bien souvent le fond en pâti. Or là en premier lieu je travaille sur le fond puisque l'un, à force de programmation, amènera le/les autre(s) (cf : rg.1)
En résumé l'écriture est un code qu'il faut s'approprier. Le ressenti est extrêmement important, je le reconnais, mais écrire au ressenti est, sauf cas miraculeux, une sorte de débâcle assuré, à moins de ne s'être entraîné à cette pratique (très rigoureux l'entraînement).

Essayez de vous dire ce qui ne va pas là.

Extrait 3:

« Une pluie dehors.
Ciel monocorde, teint de bistre pâle, comme un reflet du sol, ou bien l'inverse. Fureur du vent sorti de nulle part qui fustige les arbres gris et nus. La peau racornie s'effrite par petits nuages turbulents qui s'entrechoquent en tourbillonnant. La poussière s'arrache des graviers.
Tempête sur la terre.
L'automne est sur nous.

Dedans des pleurs, je crois.
Pluie sociale et salée, la pluie des humains. »


Pour le moment je me suis arrêté à cet essai là. Je suis assez content pour plusieurs raisons :
La violence (je trouve) est très présente.
Langage codifié, très très simple, programmation simpliste. Style nord-américain grave.
Et, cerise sur le gâteau, côté mythologique assez marqué (cf : plus haut).


Un bref je viens de livrer un article très mal écrit, sur comment je pense arriver à mieux écrire.

Ça frôle le dadaïsme.

Ps : j'ai fait le premier essai hier soir de 19h00 à 23h00 c'est paradoxalement le plus court, mais avec les interprétations plus haut vous comprendrez que ce qui est chiant à lire l'est aussi à écrire (dans mon cas). Le deuxième essai a été réalisé en deux temps, de 7h30 à 8h30 ce matin, puis de 13h00 à 14h00. Le dernier essai, après pauses réflexions, m'a pris une demie-heure soit de 19h30 à 20h00. Les trois essais font deux pages.
Le travail paie.

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